Des raisons structurelles à la divergence

Pour mieux comprendre cette trop forte hétérogénéité économique des États membres de la zone euro, on peut se référer aux travaux de Patrick Artus, qui présente les causes institutionnelles de cette divergence dans un article intitulé « La zone euro organise structurellement la divergence des pays » et publié dans Flash Économie, en mars 2018.

Lisons ensemble quelques extraits de cet article :
"La zone euro a plusieurs caractéristiques qui organisent de manière structurelle la divergence des situations économiques des pays […] : puisque la politique monétaire est commune, elle est stimulante dans les pays en croissance supérieure à la moyenne de la zone euro, elle est restrictive dans les pays en croissance inférieure à la moyenne de la zone euro, ce qui accroît la divergence entre les économies.
Le budget fédéral commun est de petite taille dans la zone euro. Ceci veut dire qu’un pays en difficulté doit d’abord soutenir son économie puis réduire son déficit public sans recevoir d’aide des autres pays, ce qui aggrave ses difficultés. Ceci s’est clairement vu de 2008 à 2014 pendant la récession et la crise de la zone euro, dans les pays périphériques.
La divergence des spécialisations productives. Dans une union monétaire, les pays peuvent exploiter facilement leurs avantages comparatifs, avec la disparition du risque de change, ce qui conduit à la divergence des spécialisations productives à l’instar des divergences de poids de l’industrie dans les économies."

Finalement, la première difficulté réside dans un défaut de coordination des politiques conjoncturelles, autrement dit un manque de cohérence entre la politique monétaire définie par la BCE dans la zone euro et les politiques budgétaires, définies au niveau national mais encadrées par des règles précises.

Effectivement, ces règles budgétaires n’ont pas permis d’éviter la crise des dettes souveraines dans la zone euro entre 2009 et 2012. Elles ont même contribué à la mise en place de politiques budgétaires d’austérité en période de grave récession ce qui a provoqué des différentiels très importants au niveau de la croissance économique entre États membres. De plus, au vu de la faiblesse du budget européen, seule la politique monétaire peut jouer un rôle stabilisateur alors que cela n’est en aucun cas son premier objectif.

Par conséquent, nous comprenons que la politique monétaire est procyclique (allant dans le sens du cycle), car le taux nominal unique induit des taux d’intérêt réels (le taux d’intérêt réel correspond au taux d’intérêt nominal moins le taux d’inflation) plus faibles dans les pays à plus forte croissance économique et le budget européen ne permet pas de soutenir les États membres en difficulté économique, qui sont ainsi obligés d’adopter une politique conjoncturelle de réduction des dépenses publiques.

Vous pouvez également vous reporter à la lecture de l’ouvrage Les Vingt Ans de l’euro : bilan et enjeux futurs, L’Économie européenne, 2019, de Christophe Blot, Jérôme Creel et Xavier Ragot pour approfondir les risques des divergences économiques entre les États membres de la zone euro.

Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr
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